JUSTICE

Les infractions sexuelles commises par des mineurs sont en forte hausse

Les infractions sexuelles commises par des mineurs sont en forte hausse
Publié le 19/08/2025 à 11:12

Un rapport du ministère de la Justice recense un bond de 77 % des infractions en sept ans, avec une très large majorité de mis en cause masculins. Les 13-15 ans sont davantage représentés, en particulier pour des faits d’exploitation sexuelle.

« Le sujet des infractions sexuelles perpétrées par les personnes mineures est un phénomène loin d’être marginal. » C’est ce que confirme un rapport du ministère de la Justice paru juin dernier, qui révèle qu’en 2024, plus d’un mis en cause sur quatre pour viol, et près d’un mis en cause sur trois pour agression sexuelle étaient mineurs au moment des faits.

Des faits en augmentation, comparativement à 2017, première année de référence dans le rapport, qui précise : « Entre 2017 et 2024, le nombre de mis en cause dans une affaire comportant au moins une infraction de violences sexuelles augmente fortement, passant de 8 900 à 15 700. » Soit un bond de 77 % en sept ans.

Au total, 92 100 mineurs ont été mis en cause sur cette période pour des infractions sexuelles, lesquelles sont classées par viol, agression sexuelle, exploitation sexuelle ou encore violences sexuelles non physiques.

Des chiffres que la Chancellerie explique par le contexte du mouvement « Me too » et la libération de la parole des victimes, plus enclines désormais à signaler ces faits, même plus antérieurs, aux services de police et de gendarmerie ainsi qu’à la justice.

« Une réalité fortement genrée »

Le rapport va un peu plus loin et fait état du profil des mis en cause dans les affaires d’infraction sexuelles. 93 % d’entre eux sont de jeunes garçons, et 7 % sont des filles mineures.

Relayant le rapport sur les réseaux sociaux, la magistrate et haute fonctionnaire à l’égalité femmes-hommes Charlotte Beluet décrypte là « une réalité fortement genrée » pour chacune des quatre catégories entrant dans le champ des infractions sexuelles.

Dans les affaires de viols, 97 % des auteurs ou des mis en cause sont des hommes. Ils représentent 94 % des mis en cause dans les affaires d’agressions sexuelles et de violences sexuelles non physiques.

Le rapport indique par ailleurs que les 13-15 ans constituent la tranche d’âge la plus représentée pour les infractions sexuelles (46 %) devant les 16-17 ans (24 %). Une « prédominance » à mettre en perspective avec les régimes juridiques très différents qui s’appliquent avant et après 13 ans, pointe le ministère. Car un mineur ayant commis une série d’infractions sexuelles avant et après ses 13 ans sera souvent jugé uniquement pour celles commises après ses 13 ans, « la réponse judiciaire pour les autres infractions étant beaucoup plus limitée ».

De plus, la part des 13-15 ans est plus forte encore dans les faits d’exploitation sexuelle. Les violences sexuelles non physiques sont la catégorie d’infraction pour laquelle la part des 16-17 ans est la plus représentée (24 %).

« Plus de 7 mis en cause sur 10 ont moins de 16 ans. Ce constat impose une action éducative et préventive dès le plus jeune âge », estime la magistrate.

Exploitation sexuelle : 19 % des mis en cause sont des femmes

Et si les garçons sont majoritaires dans toutes les catégories, « la présence des filles est notable dans certaines formes d’exploitation sexuelle, notamment en lien avec le proxénétisme », souligne Charlotte Beluet.

Les filles représentent en effet 19 % des auteurs ou des mis en cause dans la catégorie de l’exploitation sexuelle « du fait d’une forte représentation dans les infractions liées au proxénétisme, où plus de quatre mis en cause sur dix sont des femmes (43 %), et dans celles concernant la pédopornographie (21 %) », indique le ministère.

Elles ne pèsent par ailleurs que 3 % des mis en cause pour les viols, « proportion la plus faible observée », et leur poids s’avère légèrement plus élevé en ce qui concerne les agressions sexuelles et les violences sexuelles (6 %).

Enfin, « seules 10 % de femmes sont mises en cause pour la corruption de mineurs ».

Les agressions sexuelles, première infraction commise

Selon les données du rapport, « les viols constituent l’infraction la plus fréquente après les agressions sexuelles » avec près de 32 000 et plus de 58 500 mis en cause sur la période 2017-2024.

Néanmoins, les faits de viols ont bondi de 148 % entre l’année 2017 et 2024, quand les agressions sexuelles affichent une hausse « plus modérée » de 47 %.

Près de 9 000 mineurs ont été mis en cause pour exploitation sexuelle, et près de 3 000 pour violences sexuelles non physique.

Fait notable également, dans 85 % des cas, les victimes de ces mineurs sont elles aussi mineures. Le Sénat révélait déjà en 2022 une augmentation de 60 % des violences de jeunes commises sur des mineurs entre 2016 et 2021.

Le ministère de la Justice ne donne toutefois pas plus d’informations sur les victimes « compte tenu des outils utilisés », précise Charlotte Beluet qui appelle à la poursuite d’une mobilisation « coordonnée et continue », avec notamment un engagement éducatif précoce mobilisant différents acteurs, dont les écoles et la justice.

Près d’un tiers des mis en cause sont condamnables

Sur les 92 102 personnes mineures mises en cause pour au moins une infraction sexuelle, 56 572 n’ont pas pu être poursuivies faute d’infraction suffisamment caractérisée ou du fait de l’irresponsabilité de l’auteur.

La réponse pénale est de l’ordre de 92,2 % sur la période observée pour les 35 530 mineurs restant, qui ont quant à eux été poursuivis, soit 39 % de la totalité de cette catégorie. Parmi eux, 20 400 ont été poursuivis devant une juridiction pour mineurs ou ont vu leur affaire transmise à un juge d’instruction, et 12 400 ont vu leur affaire classée après une procédure alternative réussie, détaille le rapport.

Ce dernier dénombre 10 794 condamnations entre 2017 et 2023, avec une majorité de peines pour des agressions sexuelles (7 900), loin devant les viols (2 071), l’exploitation sexuelle (728) et les violences sexuelles non physique (88). Pour l’ensemble des condamnations sexuelles commises par les mineurs, « les femmes ne représentent que 2 % des condamnations. »

Allison Vaslin


1 commentaire
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Alou
- il y a 2 jours
On se demande quel est le coût pour la société de ces viols et agressions sexuelles commis par des hommes. Police, justice, prison, frais de réinsertion, frais médicaux pour les victimes, sans compter leurs vies détruites à jamais, les problèmes pour elles de trouver du travail, de survivre. Pourquoi ces coûts, qui s'élèvent à des centaines de milliards d'euros, sont-ils supportés par les femmes alors qu'elles ne commettent pratiquement aucune de ces infractions?

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