JUSTICE

Déjudiciarisation : vers un renforcement du rôle des commissaires de justice

Déjudiciarisation : vers un renforcement du rôle des commissaires de justice
Publié le 27/05/2025 à 14:34

Le ministère de la Justice envisage de mettre à la charge de la profession la délivrance d’une sommation de payer aux copropriétaires défaillants et l’établissement d’un titre exécutoire. Une mission suggérée par la Chambre nationale des commissaires de justice elle-même et qui devrait contribuer au désengorgement des tribunaux.

« Dans le cadre de la mission d’urgence relative à la déjudiciarisation, la Chambre nationale des commissaires de Justice a été entendue », s’est félicitée cette dernière, le 23 mai dernier.

Le groupe de travail constitué à la demande de l’ancien garde des Sceaux Didier Migaud en 2024 a en effet retenu quelques-unes des pistes formulées par la chambre et son président Benoit Santoire, présentées en mars dernier lors d’une conférence de presse.

Une volonté de simplification

Au titre de celles-ci, la simplification de la procédure d’injonctions de payer. Comme le rappelle le rapport, si la réforme de 2022 a permis une automatisation partielle de cette procédure, les greffes doivent encore délivrer aux commissaires de justice des certificats de non-opposition.

La piste envisagée pour alléger le processus : leur permettre de poursuivre l’exécution des décisions sans cette délivrance, « sauf opposition formelle du débiteur dans un délai contraint », soulève le groupe de travail.

Autre piste retenue par la mission d’urgence : la rationalisation des procédures concernant le contentieux des charges de copropriété impayées et celui en matière locative, « selon les pistes suggérées par la Chambre nationale des commissaires de justice », précise-t-elle.

La Chambre avait notamment proposé que le commissaire de justice, « toujours sous le contrôle du juge », délivre une sommation de payer aux copropriétaires défaillants et établisse un titre exécutoire dans le cas où il ne régulariserait pas son arrière dans un délai d’un mois.

« De la même manière, il pourrait être envisagé une simplification de la procédure de recouvrement amiable des petites créances dans le sens d’une fluidification des démarches et d’une réduction du nombre des litiges », soumet le rapport.

La délégation des saisies immobilières encore à l’étude

En revanche, « en dépit de proposition reçues en ce sens », le groupe de travail a exclu la possibilité pour les commissaires de justice et notaires d’alléger la procédure judiciaire de saisie immobilière visant à une déjudiciarisation de la phase de l’adjudication.

Si cette suggestion, « qui n’est pas nouvelle », permettrait un allégement des tâches du magistrat et du greffe, admet le groupe de travail, « elle nécessite cependant une réflexion interprofessionnelle plus aboutie », indique-t-il.

Même son de cloche concernant la piste tendant à confier aux professions l’examen des réclamations concernant leurs honoraires, du fait « de sa faible incidence », conclut le groupe de travail

Les notaires, autres alliés de la déjudiciarisation

Plus globalement, le rapport de la mission d’urgence a dégagé une poignée d’autres pistes qui incomberaient à différents acteurs, à l’instar des successions vacantes et des successions en déshérence que le ministère de la Justice envisage de confier à l’administration des domaines.

Pour le premier type de succession, le service des domaines assurerait la mission de curateur. Pour le second, l’État pourrait entrer en possession des biens concernés par le biais d’une publication dans un journal d’annonces légales, propose le groupe de travail.

Il est également suggéré de davantage renforcer le rôle du notaire pour décharger les juges, en matière de liquidation et partage des successions et indivisions. Une piste développée dans une « fiche d’approfondissement » non présente dans le rapport.

Ce dernier prévoit également de mettre à la charge de ces professionnel le prononcé de l’adoption simple de l’enfant du conjoint, « en prévoyant pour les tiers intéressés le droit de saisir le juge et en limitant le coût de cet acte ».

Recentrer le juge sur son office

Le groupe de travail mise par ailleurs sur une réévaluation des conditions d’intervention de différents juges, et notamment du juge de l’hospitalisation sous contrainte.

Faute de pouvoir déjudiciariser le contentieux des soins sans consentement, le groupe songe par exemple à inscrire le patient en fugue au fichier des personnes recherchées et de suspendre temporairement la procédure judiciaire jusqu’à sa réintégration, ce qui éviterait aux juges et médecins notamment « de se conformer inutilement à une procédure lourde et difficilement applicable lorsque le patient est absent ». Une piste formulée depuis plusieurs années par la Cour de cassation.

Dans le même ordre d’idée, dans le domaine du surendettement, il est envisagé de réformer la procédure de rétablissement personnel qui passerait par un allégement du contrôle du juge des contentieux « par le biais d’un recours unique devant ce dernier, qui porterait sur l’ensemble des mesures prises par la commission ». Le rapport pointe d’ailleurs une hausse « significative » du nombre de ces dossiers enregistrés en 2024, qui induirait une hausse des saisines du juge en 2025.

Allison Vaslin

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