Le nombre d'animaux utilisés en laboratoire pour
la première fois a diminué de près de
11 % en un an dans l'Union européenne et en Norvège. Leur utilisation chute
notamment en France, bien que l'on comptabilise chez nous encore près de 250 000 expérimentations associées à une douleur « sévère » pour les animaux.
La Directive de 2010 relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques visant à
« Remplacer l'expérimentation animale dès que possible, et à défaut,
Réduire le nombre d'animaux utilisés et à Raffiner les procédures » (règle
des 3R) porte ses fruits ! C’est
en tout cas le constat fait par la Commission européenne dans son « Summary Report on the statistics on the use of animals for
scientific purposes in the Member States of the European Union and Norway in
2022 »
publié fin Juillet.
Le document indique que les chiffres du 6e rapport de la Commission
européenne concernant l’utilisation des animaux en science « démontrent
des effets positifs évidents de [cette] Directive sur les différents domaines
signalés par les États membres, notamment en ce qui concerne l’utilisation
d’animaux à des fins règlementaires ».
En 2022, les usages
pour les procédures réglementaires continuent leur diminution, avec un recul de
16,2 % par rapport à 2021, et de 32 % au regard de 2018. Une tendance
qui avait déjà émergé en 2015 et qui se poursuit donc, pointe la Commission. Cette chute s’explique en partie par l'amenuisement du nombre de lois autorisant les tests sur les médicaments à usage humain, lequel a débouché sur 500 000 expérimentations en moins.
La réutilisation d’animaux
passe sous la barre des 100 000
Plus largement, à l’échelle
des 27 pays membres de l’UE et de la Norvège, le nombre d’animaux utilisés pour
la première fois dans le cadre de recherches et de tests en 2022 recule de
10,9 % par rapport à 2021, avec 1 020 836 animaux en moins. Des
chiffres qui confirment « le caractère exceptionnel de l’augmentation
de 2021 [dû à l’utilisation de 1,3 million de poissons dans le cadre
de trois projets] et une tendance à la baisse à plus long terme ».
Les espèces de mammifères
utilisées pour la première fois connaissent ainsi une baisse de 10,1 % au
cours des cinq dernières années, avec un recul de 25 % pour les rats et de
9 % pour les souris qui demeurent malgré tout les animaux le plus utilisés
en sciences (étant génétiquement très proches des humains), avec un taux de
47,8 %, suivies des saumons, truites et ombles chevalier (15,4 %) et
des rats (7,5 %). L’utilisation pour une première fois des poissons zèbres,
oiseaux et lapins a quant à elle tendance à augmenter au fil du temps, avec
respectivement +39,7 % par rapport à 2018, +18,5 % et 12,1 %. Des
améliorations sont donc attendues par la Commission de ce côté-ci.
Autre donnée significative plus encourageante : le nombre d’animaux réutilisés à des fins
scientifiques passe pour la première fois sous la barre des 100 000
réemplois, avec 92 448 animaux en 2022, « confirmant
une diminution des réemplois depuis 2018 » souligne le rapport. L’article
16 de la Directive rappelle notamment qu’un animal peut être réutilisé à
condition qu’il a pleinement retrouvé son état de santé et de bien-être
général.
9,2 % des utilisations
associées à une douleur « sévère » pour l'animal
Comme le rappelle le Summary report, la Directive de 2010 exige que soit déclarée
la gravité réelle de la souffrance ressentie par chaque animal lors de son utilisation, classée en plusieurs catégories : « sans réanimation », « légère »,
« modérée » et « sévère ». Il s’agit également d’un
indicateur dans le réemploi des animaux en vue d'une nouvelle procédure, puisque ces derniers peuvent être réutilisés si la précédente procédure était classée « légère » ou « modérée ».
En 2022, plus de 784 000
utilisations d’animaux ont été classées dans la catégorie « sévère », autrement
dit, ces animaux ont pu « éprouver une douleur, une souffrance ou une
angoisse intense ou modérée de longue durée », avec de potentielles
incidences graves sur leur bien-être ou leur état général.
Ces déclarations, qui représentent plus de 9 % de celles faites pour 2022, sont toutefois moins nombreuses que les années précédentes, avec 918 202 cas en 2021 et 976 445 en
2018. Les cas sévères ont notamment été répertoriés dans le cadre de procédures
menées pour la production d’anticorps monoclonaux par ascite (accumulation de
liquide dans l’abdomen) chez des souris.
Précisons que la directive appelle les États membres à veiller à ce que toutes les procédures
soient menées sous anesthésie générale ou locale et recourent à des
analgésiques ou à une autre méthode appropriée, afin de s’assurer que la
douleur, la souffrance et l’angoisse soient limitées au minimum. La France
est d’ailleurs responsable de près d’un tiers des cas d'expérimentations associées à une douleur sévère, avec
244 710 procédures classées comme telles.
Le nombre d’utilisations d’animaux en France se réduit
Et si la France comptabilise
également le plus haut nombre d’utilisations d’animaux pour la recherche
scientifique avec l’Allemagne notamment, en 2022, ce sont 91 872 animaux
de moins qu’en 2021 qui n’ont pas pris part aux recherches, portant le nombre à
1 802 025 (contre 1 893 897 en 2021).
Cependant, en ajoutant les
animaux d’élevage non utilisés dans une procédure expérimentale mais génotypés
par des techniques invasives ne permettant pas leur identification à ce total
global, le nombre grimpe à 2 128 058 utilisations pour 2022. Cette
inclusion est due à la mise à jour en 2022 du Guide sur les animaux
génétiquement modifiés par la Commission européenne, ayant conduit à élargir le
périmètre de l’enquête annuelle, d’après la Direction générale de la recherche
et de l’innovation du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche.
Comme en Europe, les souris
restent en tête de liste des espèces les plus utilisées en France en 2022 (66 %),
suivies des lapins et poissons toutes espèces confondues (9 %
respectivement), et des rats (8 %). Ces animaux sont principalement
utilisés pour la recherche fondamentale à 39 %, et pour les études
toxicologiques et réglementaires à 24 %, d’après la Commission. À
l’échelle européenne, les animaux sont en majorité utilisés pour la recherche à
72 %, soit plus de 6,1 millions d’animaux sur près de 9 millions.
Malgré des améliorations dans
plusieurs domaines, 8 385 397 animaux sont toutefois passés entre les
mains des laborantins en 2022 en Europe et en Norvège.
Allison
Vaslin